Dans un récent article (repris ici ou là), je tentais de répondre à la question "Pourquoi le web participatif ne fait-il pas participer ?" Je voudrais aujourd'hui relancer la question et surtout apporter un nouvel élément de réponse avec un exemple d'actualité récente. L'article précédent présentait la vision négative : seulement 1 % des personnes contribuent à un projet participatif ... Regardons maintenant le verre à moitié plein !
Il ne vous aura pas échappé qu'un avion a disparu depuis plusieurs jours maintenant. Un dispositif multinational sans précédent a été mis en place pour trouver des traces de cet aéronef ou quelques éléments de réponse. Un site de crowdsourcing a même été mis à contribution : Tomnod permet aux internautes d'identifier des objets et des lieux sur des images satellite en les croisant avec des interfaces de cartes en ligne. Ce site, appartenant à Digital Globe, entreprise qui fournit notamment des images à Google Earth, a déjà été utilisé pour rechercher la tombe de Gengis Khan en Mongolie, cartographier des dégâts à Christchurch en Nouvelle Zélande après le tremblement de terre de 2011 ou compter les camps de réfugiés en Somalie. Le premier projet (toujours ouvert sur le site de national Géographic) a permis à 156.436 web-explorateurs d'analyser 971.169 images satellites en taguant des lieux (routes, rivières, constructions modernes, constructions anciennes) sans bouger de leur siège et sans, pour l'instant, retrouver la sépulture du fondateur de l'Empire mongol !
Pour le vol 370 de Malaysia Airlines parti de Kuala Lumpur pour Pékin avec 239 personnes à bord et disparu des écrans de contrôle une heure après son décollage, les internautes sont invités à scruter les images satellite du Golf de Thaïlande pour y identifier d'éventuelles traces de kérosène, des radeaux ou des débris d'avion. Et ce sont plus de 2 millions de personnes qui ont cette fois-ci tagué près de 645.000 éléments ; Un succès à faire tomber le serveur du site de Digital Globe (Cf. Communiqué de presse de l'entreprise).
Malgré ce succès, on peut, la encore, considérer que peu de personnes participent. Même si 2 millions c'est énorme pour un projet participatif, cela ne représente que 0,02 % de la population mondiale. Si on considère que (seulement) 40 % de la population mondiale est connectée à Internet, cela fait toujours "que" moins de 0,07 % de la population mondiale connectée qui a participé à ce projet. Nous sommes bien dans la règle des 1 % évoquée dans mon précédent article.
Mais 1% de la population mondiale connectée, cela fait tout de suite près de 30 millions de personnes ! Et c'est cela le principe du crowdsourcing : compter sur l'effet de masse, même si peu de gens jouent le jeu.
Le deuxième élément est que les participants, qu'il s'agisse de Wikipédia ou de Tomnod sont volontaires. Personne ne les a forcés à contribuer. Ils vont donc souvent le faire de façon plus efficace, voire plus zélée. Dans l'exemple présent on peut imaginer que beaucoup de gens ont créé des comptes "pour voir" mais que ceux qui ont véritablement tagués des cartes l'ont fait pour de nombreux éléments. Sur Wikipédia, nous avions vu que les deux plus gros contributeurs de l'encyclopédie en français ont réalisé à eux seul près de 2% des contributions.
Et pour rester sur une note positive, imaginons la marge de progrès ! Ce chiffre de 1 % ne peut que croitre ...
François JEANNE-BEYLOT
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